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BLOG : Prise en charge de la dimension changement climatique dans la planification territoriale : quels outils et à quelles fins ?

Auteur : Djibril DIOP
Conseiller Technique Décentralisation et Changement Climatique
Projet Décentralisation des Fonds Climat (IED Afrique)

17 janvier 2018

Le changement climatique et les désastres qu’il entraine sont reconnus comme une grave menace sur le développement économique local. En effet, ses effets sont défavorables, tant sur la qualité de vie des populations que sur les secteurs productifs (agriculture, pastoralisme, foresterie, etc.), les ressources naturelles, la sécurité alimentaire et la nutrition, et affecte les capacités de résilience des communautés.

Selon le Groupe Intergouvernemental d’Experts sur l’Evolution du Climat (GIEC), le changement climatique peut être défini comme : « Tout changement climatique dans le temps, qu’il provienne de la variabilité naturelle ou qu’il soit le résultat de l’activité humaine. » A l’échelle locale, on fait référence aux effets induits par les variations climatiques, telles que les changements dans la périodicité, la quantité des précipitations et à leurs conséquences sur l’économie et la santé des populations.

Les défis et enjeux liés au changement climatique en font dès lors une préoccupation universelle et un enjeu de gouvernance mondiale du fait de la nature des risques et de l’étendue des impacts. La lutte contre ce phénomène exige ainsi une mobilisation convergente d’acteurs à travers des processus et systèmes de gestion des risques et de gouvernance de l’adaptation au changement climatique multi-échelles et multi-acteurs, avec une place primordiale à la participation active des communautés.

Cependant, dans leurs formats actuels, les plans locaux de développement ne permettent pas de réduire de façon significative les effets liés au changement climatique. Ils ne tiennent souvent pas compte dans leurs analyses des vulnérabilités au changement climatique et n’apportent ainsi pas de réponses appropriées à ces questions.

Il est par conséquent important d’intégrer des outils appropriés aux différentes étapes du guide de planification du développement territorial afin de mieux prendre en charge la dimension changement climatique. Parmi ces outils se distingue la Matrice de Vulnérabilité (MV), qui, lors de la phase diagnostic, permet aux communautés d’examiner l’impact des changements climatiques sur un large éventail de ressources, d’activités et d’éléments socio-économiques qui composent leurs moyens d’existence.

De façon spécifique, la MV permet d’identifier pour une zone donnée les moyens d’existence les plus vulnérables et de déterminer les risques qui ont les impacts les plus importants sur la communauté, avec comme enjeu fondamental l’identification de stratégies d’adaptation pertinentes capables de faire face aux risques identifiés. L’élaboration de la MV se fait à travers un exercice participatif dans lequel prennent part toutes les parties prenantes de la communauté (les organisations de producteurs, les services techniques, la collectivité locale, les organisations féminines, la société civile…). Elle comporte les étapes ci-après :

  1. analyse des moyens d’existence dominants dans la zone étudiée ;
  2. identification des différentes menaces pour ces moyens d’existence ;
  3. création d’une matrice qui permet de confronter les moyens d’existence (lignes) aux risques identifiés (colonnes) ;
  4. discussion d’une échelle (souvent entre 0 et 5) pour illustrer l’impact des risques sur les moyens d’existence (on peut aussi utiliser des couleurs)
  5. remplir la matrice en affectant une note à chaque case, dans un cadre participatif ;
  6. agréger les évaluations par ligne et par colonne.

Illustrations : Matrice de vulnérabilité aux risques climatiques passés et actuels de la CR Lour Escale

Légende : 0 = pas d’impact, 1= impact très faible, 2= impact faible, 3= impact moyen, 4= impact fort, 5= impact très

Source : Enquêtes TACC, 2014

A l’échelle territoriale, il est important de noter que les nombreuses tentatives d’intégration de l’adaptation et de l’atténuation dans les Plans de Développement Communaux (PDC), grâce au parrainage de projets/programmes, ne sont pas suivies d’effets perceptibles ou durables sur le terrain. Les communautés n’ont en réalité observé aucun changement majeur, car les actions d’adaptation et de résilience proposées face aux risques de catastrophes n’ont souvent pas d’incidences budgétaires. Il est ainsi nécessaire de renforcer les processus et procédures d’élaboration des plans locaux de développement. A ce titre l’échelon national a un rôle majeur à jouer, particulièrement dans l’élaboration du cadre stratégique, l’encadrement technique, la diffusion de bonnes pratiques, le renforcement des capacités, la fourniture d’outils, de supports, de guide méthodologique…, tout en laissant aux collectivités territoriales une large possibilité de choix dans les solutions.