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Compétitivité du secteur horticole au Sénégal : Étude des filières de la banane, de l’oignon et de la pastèque

L’horticulture joue un rôle économique important, au Sénégal. Le pays produit une large gamme de produits horticoles à forte valeur ajoutée
pour répondre à la demande des marchés nationaux, sous-régionaux et internationaux.

Mais pour tirer davantage partie de ce secteur pourvoyeur d’emplois et de revenus et renforcer la compétitivité des produits horticoles sur le marché des exportations, le pays a intérêt à concentrer ses efforts dans le développement des filières les plus performantes et qui présentent des avantages comparatifs à la commercialisation.

Dans cette étude, nous cherchons à évaluer le niveau de compétitivité du secteur horticole sénégalais de façon globale (par rapport aux économies mondiales) et comparativement aux autres pays d’Afrique, plus particulièrement de la sous-région ouest africaine : la CEDEAO. Nous nous limiterons aux spéculations suivantes : l’oignon, la pastèque et la banane . Les outils d’analyse utilisés dans le présent article sont les indicateurs d’avantage comparatif de Balassa pour évaluer le niveau de compétitivité des produits, le degré d’engagement qui fournit une information sur la structure interne du pays en prenant en compte la demande intérieure. Aussi, une analyse de la matrice de segmentation des performances commerciales sur chaque produit sera faite pour évaluer les déterminants de la compétitivité des produits.

Analyse de la production des filières

Il faut rappeler que d’importantes politiques agricoles ont été mises en œuvre dans le pays visant à améliorer la production globalement mais aussi la productivité et la compétitivité des produits agricoles, notamment des produits horticoles tels que la mangue, la pastèque, l’oignon, etc. Pour l’atteinte de ces objectifs, d’importants financements ont été réalisés dans le secteur agricole. Nous pouvons citer le PNDA, la GOANA, la SCA avec la grappe agro-industrie. Le socle commun de ces programmes s’appuie sur la loi d’orientation agro-sylvo-pastorale du 4 juin 2004 . Si on se limite seulement aux objectifs de la SAC, toujours d’actualité, celle-ci vise, entre autres à :

  • a. accroître le potentiel de contribution du secteur agricole à la croissance du PIB et des investissements privés,
  • b. stimuler l’innovation, porter à environ 800.000 tonnes la production horticole annuelle du Sénégal et à plus de 50.000 tonnes par an les exportations de produits horticoles réduisant ainsi le déficit de la balance commerciale d’au moins 15% et améliorant le Produit intérieur brut de 2%.

Le tableau ci-après fournit des statistiques sur la production horticole depuis 2OO8.

Tableau 1 : Evolution de la production horticole

Années 2008 2009 2010 Variation de la production (2009-2010)
Productions (en tonnes) 548.000 550.000 578.000 5%

Source : bulletins statistiques (décembre 2010, 2011), ANSD

Bien que le gap avec les objectifs de la SAC reste important, des progressions ont été consenties sur le niveau de production horticole. En 2010, celui-ci a atteint 580 000 tonnes, soit un taux de croissance de 5% par rapport à l’année 2009. Ce niveau de production est largement tributaire de celui de l’oignon. En effet, ces dernières années l’on assiste à une expansion fulgurante des performances productives dans ce secteur.

La quantité d’oignon produite a progressé de 13% par rapport à 2004 atteignant 4500 tonnes en 2005. La croissance de la production a atteint son niveau record en 2007 avec une hausse de 137%. En 2011, le niveau de la production était de 235000 tonnes. Pour la banane, la production était de 47000 tonnes en 2010, soit 7000 tonnes de plus que l’année 2009. La principale zone de production est la région de Tambacounda. Cependant, il faut noter que l’amélioration de la production est due en partie à l’appui de l’OFADEC en partenariat avec l’OCCDP . En ce qui concerne la pastèque, les producteurs en ont une grande expérience étant donné que la spéculation fait partie des produits les plus mieux connus par les paysans. Aussi sa production est-elle plutôt hivernale et rurale bien que certaines zones comme les Niayes ont commencé à s’y intéresser. C’est dans les régions de Kaolack, Kaffrine et Thiès que sa production est plus intensive. En 2010, la production de pastèque a atteint 240000 tonnes.

Echanges commerciaux et niveau de compétitivité

En faisant une comparaison par pays sur les performances commerciales, le Sénégal est de loin moins performant que beaucoup de pays , notamment sur les spéculations considérées. Respectivement, le Mexique, l’Inde et l’Equateur sont les pays les plus performants sur le marché international au commerce de la pastèque, de l’oignon et de la banane. Dans la sous-région, les produits du Sénégal sont en concurrence avec ceux des autres pays. On peut citer la Côte d’ivoire et le Mali pour la banane et le Niger pour l’oignon. Sur ce dernier, le Niger est plus spécialisé et présente une diversité culturale incomparable. En sus, il faut ajouter que le Sénégal reste toujours importateur d’oignon.

La production d’oignon, bien qu’améliorée, reste insuffisante pour assurer la demande intérieure. Pour la banane, le mali présente les meilleurs rendements même sur le plan international. Aussi s’agit-il d’un produit dont la demande intérieure dans ces deux pays est très importante alors qu’au Sénégal il est consommé que pour le dessert. Cependant, le Sénégal est l’un des plus grands producteurs de pastèque dans la sous-région. L’expérience accumulée dans la production ces dernières années a permis d’accéder à des niveaux de production tels que l’ouverture sur le marché mondial était inévitable. La demande intérieure en pastèque est très importante mais ces dernières années, le marché européen, notamment l’Espagne et la France, a été prospecté pour écouler le produit.

Résultats économétriques

L’estimation du niveau de compétitivité des produits s’appuie sur l’approche néoclassique mettant l’accent sur les performances commerciales. L’indicateur utilisé est l’avantage comparatif de Balassa. L’avantage comparatif indique pour un produit donné si la part des exportations du pays est significativement différente de la part chez les concurrents. Le degré d’engagement sur une spéculation reflète la structure de sa production tout en tenant compte des flux commerciaux avec le marché international.

L’analyse des avantages comparatifs par produit montre que seule la pastèque présente un fort avantage comparatif. En moyenne, sur la période de 2002/2009, son niveau s’élève à 8,4. Il a été de 17,9 en 2009 montrant un fort degré de spécialisation dans la production de la pastèque. Le degré de spécialisation sur la même période est supérieur à 1, montrant ainsi que la production intérieure augmente plus rapidement que la demande intérieure. Etant donné que les importations sont presque insignifiantes sur ce produit, ce degré de spécialisation reflète le poids conséquent des exportations de pastèques, notamment sur les dernières années. Outre, le déterminant intrinsèque du niveau de compétitivité de la pastèque est dû à la bonne qualité de la production. Concernant les deux autres produits, il est noté un désavantage commercial sur toute la période 2002/2009 surtout pour l’oignon où le degré de spécialisation reflète une quasi-absence du produit sur le marché des exportations et du niveau des importations toujours pesant pour combler la demande intérieure. La comparaison faite par rapport aux pays de la sous-région donne une faible compétitivité-prix du produit local. Ce désavantage commercial est surtout imputable à un problème structurel sur la production d’oignon et une faible compétitivité-prix pour la banane.

Conclusion et recommandations

Il ressort de cette étude que sur les trois produits étudiés à savoir l’oignon, la banane et la pastèque, seule cette dernière présente un avantage comparatif à sa commercialisation sur le marché des exportations. Cet avantage est imputable à la qualité du produit attirant les partenaires commerciaux tels que la France et l’Espagne. Etant donné que les exportations en pastèque sont insensibles à la demande mondiale, l’on devrait en profiter en augmentant notre capacité de production tout en veillant à sa bonne qualité et aux respects des accords sur la normalisation des produits à l’exportation vers l’Europe.

Pour les deux autres produits, l’oignon et la banane, présentant des niveaux de compétitivité faibles, l’on devrait revoir les chaines de production et les revaloriser. Respectivement, les désavantages enregistrés sur ces deux produits sont dus à des problèmes structurels qui font que la production locale est insuffisante pour combler la demande intérieure, et aussi à une faible compétitivité-prix reflétant une faible maîtrise de la production comparativement aux concurrents de la sous-région.

Diabel DIOP
Elève Ingénieur statisticien économiste
diabel.math@gmail.com