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Participation de IED AFRIQUE à la COP27, du 06 au 18 novembre à Sharm El-Cheikh, Égypte

L’ONG IED Afrique, représenté par son Directeur M. Mamadou FALL, a pris part à la 27e Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP27) qui s’est tenue du 6 au 18 novembre 2022 à Sharm El-Cheikh, en Égypte. Cette rencontre de très grande envergure sur le climat a été une occasion de faire un premier bilan mondial des efforts climatiques des pays. Cette année, sous le thème « Ensemble pour la mise en œuvre », la COP27 visait à respecter les engagements et les plans climatiques et à les transformer en mise en œuvre tangible, grâce à des initiatives concrètes sur le terrain, qui augmenteraient l’ambition en matière d’atténuation, d’adaptation et de moyens de mise en œuvre et de soutien aux solutions climatiques essentielles.

28 novembre 2022

COP 27 : Encore un pas en avant et plusieurs en arrière

Un nouveau fond sur les pertes et dommages

En 2022, Sharm El Sheikh était l’hôte pour la COP 27, qui a réuni 44 000 personnes du monde entier pour relever le défi mondial du changement climatique. Cette année, elle s’est achevée en créant la surprise en lançant un fond sur les pertes et dommages, ces dégâts irréversibles causés par le dérèglement climatique.
Pour l’heure, les financements climatiques existants ne sont consacrés qu’aux efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre ("atténuation") ou aux mesures d’adaptation pour se protéger contre les impacts du réchauffement. Mais depuis trente ans, les pays les plus vulnérables, les plus touchés par les pertes et dommages, réclament à cor et à cri la création d’un nouveau mécanisme dédié, financé par les plus grands émetteurs, les pays du Nord. Ces derniers ont donc largement infléchi leur position à Charm el-Cheikh en acceptant de mettre en place un instrument financier. Et les sommes nécessaires s’annoncent colossales puisque les coûts des pertes et dommages sont estimés entre 290 et 580 milliards de dollars par an dans les pays en développement d’ici à 2030, et jusqu’à 1700 milliards en 2050 (selon le secrétariat de la CCNUCC). Ses modalités de mise en place devront être élaborées par un comité spécial pour adoption à la prochaine COP28.

Refus de plusieurs pays de sortir des énergies fossiles

Ce qui est paradoxal, c’est que la décision finale a marqué un recul sur les énergies fossiles par rapport au Pacte de Glasgow, adopté à la COP26 l’an dernier. Parmi les autres éléments à retenir de la décision finale, les observateurs s’accordent sur le fait que rien n’a évolué par rapport au Pacte de Glasgow, adopté en 2021. L’objectif 1,5°C a été sauvé in extremis mais les plans pour y parvenir sont absents des discussions.
En outre, la sortie des énergies fossiles n’est quant à elle toujours pas actée, et on continue de parler d’une sortie progressive du charbon, pas de mention du pétrole et du gaz. Finalement, les pays n’ont pas réussi à s’entendre sur une réduction progressive de toutes les énergies fossiles, se contentant de conserver l’appel à la réduction progressive du charbon lancé lors de la COP26 (l’accord de Glasgow). La présidence égyptienne a produit un texte qui protège clairement les États pétroliers et gaziers et les industries des combustibles fossiles. Le débat donc promet d’être encore houleux sur la question des énergies fossiles à la COP29 de 2024.

Financer l’adaptation menée localement (LLA) pour une plus grande justice climatique

Lors de la COP 26, les dirigeants mondiaux s’étaient engagés à doubler le financement de l’adaptation d’ici 2025, et avaient promis plus de 450 millions de dollars pour l’adaptation au niveau local.
Pour la COP 27, l’un des enjeux était « d’Intensifier le soutien à l’adaptation » et pour les dirigeants présents à la COP 27, l’accent était mis sur l’augmentation des ressources allouées à la mise en œuvre d’actions concrètes en matière de d’adaptation menée au niveau local (LLA), en plaçant les partenaires locaux et leurs priorités au cœur de la scène. Les communautés qui ont émis le moins de carbone sont confrontées aux pires impacts climatiques.
Bien que la notion de l’adaptation menée localement (LLA) ne soit pas la seule solution pour remédier à cette injustice, c’est un outil efficace pour redistribuer le pouvoir, les ressources et l’arrimer aux besoins et préoccupations des communautés déjà confrontées à des crises croissantes.
De nombreux projets ont été développés dans des pays comme la Tanzanie, le Kenya, le Mali et le Sénégal pour une plus grande effectivité de la décentralisation des fonds climat (DFC). Ce mécanisme a été conçu pour s’assurer que les ressources parviennent aux communautés confrontées à une vulnérabilité disproportionnée au changement climatique. La stratégie demande explicitement aux planificateurs de projets d’intégrer les femmes et les autres populations marginalisées dans la planification des investissements et exige des évidences sur la façon dont ces groupes sont affectés par les activités du projet.
L’adaptation menée localement (LLA) n’était pas officiellement à l’ordre du jour de la COP 27. Pourtant, donner la priorité à la LLA par le biais de divers financements, politiques et mécanismes enverra un signal fort que les gouvernements sont sérieux au sujet de l’adaptation et du développement durable lors de la COP 27. Avec la LLA, les plans nationaux d’adaptation seront plus solides et plus attrayants pour les bailleurs de fonds, les processus de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) tels que l’Objectif mondial sur l’adaptation et le Bilan mondial bénéficieront d’une meilleure information, et les fonds climatiques seront plus redevables envers les bénéficiaires et les bailleurs de fonds.

Les enjeux de départ de la COP 27

Aujourd’hui en plus de la guerre en Ukraine, la crise énergétique, la crise alimentaire viennent s’ajouter des tensions géopolitiques entre les États-Unis et la Chine, les deux principaux pays émetteurs de gaz à effet de serre. Pourtant, bien que la conférence de Charm el-Cheikh pourrait être considérée comme une COP « de transition », des avancées étaient attendues sur les enjeux ci-dessous :
• Créer un mécanisme de financement pour faire face aux pertes et dommages ;
• Renforcer les objectifs nationaux de réduction des émissions ;
• S’assurer que la promesse de financement climatique de 100 milliards de dollars sera tenue ;
• Intensifier le soutien à l’adaptation ;
• Respecter les engagements pris à Glasgow ;
Au final, les annonces majeures ci-dessous ont été retenues :
1) L’Union européenne annonce une relève de son ambition climatique
En effet, le vice-président de la Commission européenne, a annoncé que l’Union européenne était prête à réduire « d’au moins 57% » ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 par rapport à 1990 - contre 55% jusqu’à présent. "
2) L’initiative de Bridgetown vise à réformer le système financier mondial
Elle vise la refonte du système financier mondial pour que les pays pauvres n’aient plus à choisir entre rembourser leur dette et investir dans la transition énergétique et l’adaptation au changement climatique. Une initiative de lancer un groupe des sages de haut niveau sur les financements innovants pour le climat regroupant des organismes comme le FMI, la Banque mondiale et l’OCDE, a été approuvée lors de la COP. Il devra faire des recommandations sur des solutions concrètes d’ici le printemps prochain. Et Emmanuel Macron a annoncé la tenue en juin 2023 à Paris d’une conférence internationale sur un nouveau pacte financier avec le Sud, avec le souhait de "créer les conditions d’un véritable choc de financement vers le Sud".
3) Un bouclier mondial contre les risques climatiques mobilise 210 millions d’euros
Le 14 novembre, le V20 (le groupe des pays les plus vulnérables) et le G7 ont annoncé le lancement du Bouclier mondial contre les risques climatiques (Global Shield en anglais). Il vise à aider les populations à financer les impacts du réchauffement via un "financement pré-organisé" qui peut être déboursé avant ou juste après une catastrophe climatique. Cela inclut en particulier des systèmes d’assurance contre les dégâts causés aux récoltes, aux bâtiments ou contre l’interruption d’activités d’une entreprise. Doté de 210 millions d’euros, il bénéficiera à un premier groupe de pays incluant Bangladesh, Costa Rica, Fiji, Ghana, Pakistan, Philippines et Sénégal. Présenté par l’Allemagne, à la tête du G7, comme une des réponses aux pertes et dommages, ce bouclier ne fait pas l’unanimité auprès de la société civile et ne saurait remplacer la création d’un nouveau mécanisme dédié, qui fait toujours l’objet de discussions.
4) Un nouveau partenariat pour une transition énergétique juste a été signé avec l’Indonésie
Lancés à la COP26, les partenariats pour une transition énergétique juste (JETP) font des émules. L’an dernier, l’Afrique du Sud avait inauguré le principe. Les États-Unis, la Grande-Bretagne et l’Union européenne s’étaient engagés à lui verser 8,5 milliards de dollars pour l’aider à décarboner plus rapidement son secteur de l’électricité, aujourd’hui produite à 80% à partir de charbon. Lors du G20 de Bali, un nouveau JETP a été annoncé entre l’Indonésie et un groupe de pays incluant les États-Unis et le Japon, pour un montant de 20 milliards de dollars, soit probablement le plus important financement climatique jamais réalisé. En retour, le pays, parmi les plus importants émetteurs au monde, s’engage à fermer ses centrales au charbon et à avancer de sept ans, en 2030, le pic d’émissions du secteur. Le Royaume-Uni et le Vietnam devraient à leur tour signer un JETP d’ici la fin de l’année.
A la suite de sa participation, IED Afrique retient comme leçon majeure que "Les gouvernements se sont mis d’accord à la COP27 pour financer une partie des dégâts causés par le changement climatique, mais ne sont pas prêt à limiter ces dégâts en réduisant davantage les émissions de gaz à effet de serre et l’usage des énergies fossiles".