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Adapter les objectifs des organisations paysannes à leurs besoins de développement : le rôle du Comité d’approbation des interventions (CAI) instauré par le PNAAFA

Depuis 2011, les organisations paysannes de Guinée, soutenues par le Programme National d’Appui aux Acteurs des Filières Agricoles (PNAAFA), se familiarisent progressivement avec les mécanismes et outils de mise en œuvre du Programme, et cela avec succès. En plus des formations, le PNAAFA met à la disposition des producteurs des manuels, des outils de gestion et un cadre de réflexion et de discussions pour leur auto-prise en charge. L’un des mécanismes nouveaux mis en place par le PNAAFA est le Comité d’approbation des interventions (CAI). Il s’agit là d’un cadre de concertations, qui se tient dans chacune des régions naturelles.
L’enjeu de cette expérience c’est d’amener les paysans vers une planification rationnelle de leurs besoins et une meilleure gestion de leur programme de travail et de budget annuel mettant en paquets des activités réalistes et réalisables.

Le CAI, un cadre multi-acteurs au service de l’harmonisation du développement rural

A l’occasion des sessions annuelles du CAI, les acteurs clés de la mise en œuvre du Programme (la Confédération Nationale des Organisations paysannes de Guinée –CNOPG-, ses Cellules techniques régionales et les Unités régionales de Coordination du PNAAFA) se retrouvent pour parfaire leurs plans d’affaires. Le Comité d’approbation des interventions est un organe jeune, qui a démarré avec la mise en œuvre du PNAAFA.

De nombreuses structures participent aux sessions des CAI. En plus des acteurs mentionnés plus haut, il y a les partenaires représentants d’autres projets et bailleurs de fonds évoluant dans le développement rural et agricole. L’idée-force est que les participants aux sessions aient une vision commune et harmonisent les interventions dans la région.

Le rôle du CAI est de recevoir et valider l’éligibilité au financement du PNAAFA des activités retenues lors des sessions des Conseils agricoles régionaux, en tenant compte des contraintes et réalités propres aux zones, aux capacités réelles des OPA, mais aussi en tenant compte des actions menées par d’autres projets de développement dans les mêmes zones, afin d’éviter les duplications d’activités.

Les sessions du CAI sont présidées par un représentant de la CNOP-G et il est composé des représentants des fédérations impliquées ; du représentant de la CNOP-G pour la région ; du représentant de l’Unité régionale de Coordination du PNAAFA (URC) et du représentant de la Direction régionale de l’agriculture. La CNOP-G assure le secrétariat du CAI.

Pour rappel, le CAI est né avec le PNAAFA. Il affine les mécanismes de mise en œuvre du Programme, en complétant les structures de concertation existant au sein des Organisations paysannes (OPA). En instituant cet organe, le PNAAFA apporte une forte valeur ajoutée aux dispositifs de mise en œuvre du Programme.

Le CAI pour compléter les CAR et les Mini CAR

Il est à noter que depuis quelques années déjà, existaient deux (02) instances de concertation au sein des OPA : les ateliers filières ou Mini-Conseil Agricoles Régionaux (Mini-CAR) et les Conseils Agricoles Régionaux (CAR) (voir encadré 1 et 2). Ces instances sont des cadres de rencontres initiées par la CNOP-G, à l’effet de présenter et débattre de la pertinence des plans de développement présentés par les OPA en vue de les valider.

Mais bien souvent, les plans de travail soumis par les paysans ne tenaient pas compte des interventions des autres bailleurs de fonds, des contraintes liées aux processus de mise en œuvre des activités et des capacités de décaissement de fonds par les organisations paysannes. Les risques de duplication d’activités, avec celles financées par d’autres bailleurs de fonds et leurs erreurs de planification s’avéraient de véritables goulots pour l’atteinte des objectifs des OPA.

La mise en place et le fonctionnement du CAI se sont ainsi avérés, deux ans après le démarrage du PNAAFA, comme un outil efficace pour assurer la répartition équilibrée des investissements en direction des OPA et des zones d’interventions. Le CAI tient des sessions au niveau de chacune des régions d’intervention du Programme, une fois par an, entre la mi-septembre et octobre.

Le Mini-Conseil Agricole Régional (Mini-CAR), un cadre par excellence de concertations et de partage entre paysans

Le Mini-Conseil Agricole (Mini-CAR) est un espace de dialogue, de concertation et d’échange d’expériences entre les acteurs d’une même filière agricole dans le cadre d’une réflexion stratégique sur les enjeux liés au développement de la filière.

Cet outil d’échange a été institué suite aux difficultés rencontrées par les OPA. Ces difficultés se résumaient pour l’essentiel à l’absence de stratégies de commercialisation des produits, à la non implication des producteurs à la base dans l’identification de la problématique de développement des filières, ou encore, à la nécessité d’adaptation des appuis aux besoins des producteurs à la base et à l’absence de dialogue avec les acteurs de l’aval des filière…

L’initiative de cette expérience a été portée par la Confédération Nationale des Organisations Paysannes de Guinée (CNOP-G) pour favoriser l’implication des producteurs à la base dans l’identification et la définition de la problématique de développement des filières agricoles.

La session du Mini-CAR regroupe les producteurs, transformateurs, commerçants er transporteurs intervenant dans la même filière. Selon les nécessités, les services techniques de l’administration sont mobilisés comme personnes ressources. L’animation et la modération sont assurées par les techniciens de la CNOP-G et des leaders des OPA. Elle se tient deux fois dans l’année de façon ordinaire en début et en fin de campagne agricole.
L’organisation du Mini-CAR a pour objectifs de : i) Permettre aux acteurs d’une filière de discuter sur les problématiques de la filière ; ii) Favoriser l’identification des besoins prioritaire de chaque acteur ; iii) Identifier les contraintes majeures des acteurs de la filière ; iv) Permettre aux OPA de porter les besoins ou préoccupations de la filière au niveau du Conseil Agricole Régional (CAR) ; v) Élaborer le Plan de Développement de la Filière (PDF) ; vi) Renforcer les capacités organisationnelles des acteurs de filière.
Pour assurer un bon déroulement de la session, les étapes suivantes sont adoptées : i) Invitation des participants, ii) Élaboration de l’ordre du jour, iii) Préparation du guide de l’animation, iv) Organisation de la session, v) Production et validation du rapport.

La tenue des sessions de Mini-CAR a permis d’atteindre les résultats suivants : i) La problématique de développement des filières est identifiée et analysée par les acteurs concernés, ii) Le positionnement de l’OPA dans sa filière est renforcée, iii) Le partenariat pour l’exécution des plans de développement des filières est développé, iv) Les acteurs des filières sont responsables de leur positionnement dans les filières.

Le Conseil Agricole Régional (CAR) : un outil paysan pour harmoniser les actions des producteurs

Le Conseil Agricole Régional (CAR) est l’une des instances de concertations mises en place par la Confédération Nationale des Organisations Paysannes de Guinée (CNOP-G), au niveau des organisations paysannes à la base. Les sessions des CAR se tiennent une fois par an, dans chacune des 4 régions naturelles de la Guinée, où la CNOP-G est représentée par des Cellules techniques régionales (CTR-CNOP), soit une Cellule par région. Ces cellules techniques sont des démembrements, au niveau régional, de la CNOP-G, et sont chargées principalement de mener les activités de structuration du monde paysan. Outre cette mission prépondérante, ces cellules techniques s’occupent aussi de la coordination et du suivi rapproché des activités des groupements, unions et fédérations de producteurs et de l’harmonisation de leurs actions.

Les sessions des CAR sont organisées une fois par an, au mois d’octobre, entre les réunions des Mini CAR et les sessions du CAI. Elles se tiennent sous le format d’ateliers de concertation au niveau régional et sont destinées à affiner les activités programmées par les Fédérations et Unions lors des rencontres des Mini-CAR pour être transmis à consolidation dans le Plan de travail et de budget annuel du Programme.

Les réunions des CAR sont organisées par la CNOP-G et ses Cellules techniques régionales. Les Unités régionales du PNAAFA en assurent le secrétariat, au niveau de chaque région. L’importance des CAR vient de ce qu’ils coordonnent et harmonisent les actions des organisations paysannes à la base.

Planification efficace des activités et amélioration de la performance des OP

Pour comprendre l’importance de cette institution, il faut remonter aux difficultés que rencontraient les Organisations paysannes en Guinée dans l’identification de leurs besoins et leur planification.

En effet, pour bien d’organisations paysannes, la planification des activités s’apparentait à un simple exercice d’énumération de besoins. Celles-ci étaient programmées le plus souvent, sans tenir compte des moyens disponibles, des réalités et surtout de la pertinence des activités programmées en regard des objectifs de développement des producteurs.

Les risques de duplication d’activités étaient de plus en plus importants, surtout, pour les travaux d’aménagement hydro-agricole et les activités où plusieurs partenaires (Projets) intervenaient. C’est pourquoi, les projets et acteurs de développement intervenant dans les mêmes zones participent aux sessions des CAI.

A ce sujet, explique M. Diallo, technicien d’une OPA, « La présence des représentants d’autres projets à nos réunions sont utiles, car cela nous permet de ne pas reproduire, une activité déjà programmée sur financement d’un autre projet. » Ces rencontres permettent notamment aux OPA d’orienter les financements obtenus vers des activités, pertinentes et réalisables.

Le témoignage d’un partenaire du PNAAFA sur les mutations qu’a connues son organisation après deux années de partenariat avec le Programme illustre les changements des pratiques opérés : « Autrefois nous programmions de nombreuses activités, sans être vraiment sûrs de les réaliser toutes. Mais depuis deux ans, nous apprenons à mieux planifier nos activités, à séparer les activités pertinentes pour nos producteurs de celles qui ne le sont pas. Cela nous le devons au Comité d’approbation des interventions ».

Mamadou Baldé, coordinateur de la cellule technique de l’Union des Groupements agricoles de Soumbalako (UGAS-Mamou) et Point focal du PNAAFA au sein de cette OPA a en effet compris que pour atteindre les objectifs fixés, une programmation efficace des activités est une règle à respecter.

« Cette programmation doit être réaliste et répondre aux besoins réels des paysans », ajoute M. Baldé. Toutefois, des producteurs membres de nos unions avaient l’habitude de faire des programmations démesurées, sans pouvoir les exécuter. « La performance de l’organisation est ainsi remise en question », conclut-il.

Peu compris au démarrage du PNAAFA, le CAI s’avère aujourd’hui comme un outil efficace permettant aux OP d’adapter leurs objectifs de développement à leurs besoins les plus prioritaires.

Par

Souleymane Diallo Chargé de la Communication, Gestion des Savoirs et Visibilité, PNAAFA ;

Abdoulaye Bah Chargé de la Communication, CNOP-G

Innovations institutionnelles : Comment fonctionnent les cadres de concertations mis en place par le PNAAFA

1. Processus de validation des activités des OPA

La validation des activités proposées au titre des PTBA se fait par étape et à différents niveaux :

- Après la tenue des CAR, les sessions des CAI sont immédiatement organisées pour examiner et valider les activités à inscrire au PTBA du PNAAFA. Les activités jugées non éligibles sont rejetées ; celles estimées éligibles mais non réalisables dans l’exercice concerné sont reportées à plus tard.

- Lors de la préparation du PTBA du PNAAFA, l’UNC consolide et analyse les propositions issues des CAI. Elle apprécie la pertinence des activités proposées et leurs contributions à l’atteinte des objectifs du PNAAFA. Elle s’assure également que les activités sont portées par les groupes cibles et respectent la stratégie d’intervention du Programme. L’UNC procédera aussi à l’examen de la faisabilité des activités retenues, en particulier par rapport au calendrier et aux moyens à mobiliser.

- L’UNC transmet au Président du CP le projet de PTBA consolidé pour la convocation des membres statutaires en vue de la tenue de la session devant examiner amender et valider le rapport d’activité annuel et le PTBA.

- Au niveau du CP, où sont représentées les OPA et leurs faîtières, il sera procédé à : (i) l’examen du bilan de l’exercice écoulé, (ii) l’analyse de la pertinence, la cohérence et la faisabilité des actions proposées dans le PTBA en relation avec les ressources disponibles. Au terme de ce processus, le rapport annuel et le PTBA sont approuvés.

- A l’issue du CP, le PTBA amendé sur la base des observations formulées est transmis au FIDA pour Avis de Non Objection. L’examen par le FIDA concernera la vérification de la conformité des activités inscrites au PTBA par rapport au contenu des accords de financement et aux documents de base du Programme. S’il y a dissonance ou incohérence, le FIDA en informe l’UNC, qui procède aux ajustements et aux corrections nécessaires.

- Une fois que les observations du FIDA ont été prises en compte, le PTBA corrigé est transmis à tous les membres statutaires et aux Bailleurs de fonds.

2. Chronologie

L’élaboration du PTBA mobilise différents acteurs parties prenantes du mois d’août jusqu’à novembre de chaque année. Compte tenu de risques de survenance d’opération critiques, il importe que chaque acteur intervienne en temps opportun. Le tableau ci-après renseigne sur le déroulement du processus et situe l’intervention de chaque partie prenante dans le calendrier d’élaboration.

Périodes Activités Responsables
Août-septembre Organisation des ateliers filières ou mini CAR pour la présentation et la validation des plans de développement des filières (PDF) Fédérations, Cellules techniques régionales de la CNOP-G, Unités régionales de coordination
Septembre-
mi-Octobre
Organisation des ateliers de concertation au niveau régional (CAR et CAI) pour la consolidation du PTBA au niveau régional et l’approbation des actions programmées par les Fédérations et Unions Fédérations, Cellules techniques régionales de la CNOP-G, Unités régionales de coordination
Octobre Consolidation du PTBA du PNAAFA à partir des PTA des Fédérations et Unions UNC et URC PNAAFA
Mi-Novembre - Tenue de la session du Comité de pilotage en vue de l’examen et de l’approbation du PTBA du PNAAFA
- Prise en compte des amendements de la session du CP
UNC
Fin Novembre Envoi du PTBA examiné et approuvé par le CP au FIDA pour Avis de Non Objection UNC
Début Décembre Transmission de la version corrigée aux membres statutaires du CP UNC

Source : Manuel d’Exécution Technique du PNAAFA (Pages 116 & 117)